L’avenir de l’évolution des prix (inflation) suscite beaucoup de nervosité sur les marchés des changes. Cela vaut surtout pour le dollar et, dans une mesure plus limitée, également pour l’euro.
En avril, la Fed avait pratiquement exclu toute hausse des taux d’intérêt jusqu’en 2024. Cependant, la secrétaire au Trésor, Mme Yellen, n’a pas voulu exclure une hausse des taux d’intérêt en mai après que les données sur l’inflation rendaient des prévisions étonnamment plus fortes . Dans cette même ligne, certains commentaires lors de la réunion de la Fed du 16 juin 2021ont amené les traders à penser que la Fed pourrait envisager une augmentation plus rapide de son taux d’intérêt directeur et a fait bondir le dollar.
Les taux d’intérêt de l’euro ont également peu changé en mai. Avant cela, la hausse était plus faible que dans les autres devises, ce qui est dû au programme d’urgence de la Banque centrale européenne pour acheter des obligations d’État et des titres de sociétés. Ce programme avait été augmenté de 500 milliards d’euros supplémentaires pour atteindre 1,85 trillion d’euros et prolongé jusqu’en 2022. La hausse des taux obligataires inquiète la BCE, qui a donc accéléré ses achats d’obligations pour faire baisser les taux d’intérêt globaux. La BCE luttera contre le risque de taux d’intérêt par un assouplissement monétaire important, même si elle s’attend également à une hausse de l’inflation. Cela prouve à nouveau que la croissance économique semble être beaucoup plus importante que la stabilité des prix pour la BCE.
En Suisse, par contre, l’inflation reste à un niveau modéré grâce à la force du franc suisse. Avec une valeur de 0,6% (mai), l’inflation se situe à un niveau nettement inférieur à celui des Etats-Unis (5,0%) ou de l’Allemagne (2,5%). Le renchérissement est resté stable dans la fourchette cible de 0 à 2% que la Banque nationale suisse (BNS) assimile à la stabilité des prix.
Lors de son examen trimestriel du 17 juin 2021, la Banque nationale suisse estime que l’inflation devrait continuer à augmenter au cours de l’année. Elle est considérée comme un phénomène transitoire dû à la hausse des prix des produits pétroliers et des services liés au tourisme ainsi que des biens affectés par des goulets d’étranglement au niveau de l’offre, puis elle diminuera à nouveau en raison des conséquences de la pandémie qui continuera à peser sur la demande pendant un certain temps encore. Cependant, en raison de l’expansion du bilan de la BNS, des problèmes de financement des retraites et de la dette induite par la pandémie, une inflation plus élevée à plus long terme en Suisse est un scénario très plausible que la BNS n’a pas abordé. La BNS estime que les anticipations d’inflation à long terme en Suisse n’ont pas augmenté et qu’il ne devrait pas y avoir de changement dans sa politique monétaire expansionniste établie en 2015 : le taux d’intérêt négatif de -0,75% et, deuxièmement, la volonté d’intervenir sur le marché des changes.
Dans l’ensemble, le franc suisse reste “fortement valorisé” selon l’appréciation de la Banque nationale, mais différents oracles ont changé leur vision du dollar et s’attendent désormais à une évolution robuste plutôt qu’à une faiblesse. La baisse de plus de 2% de l’euro par rapport au dollar après la réunion de la Fed du 16 juin 2021 (partiellement inversée une semaine plus tard) peut constituer un point d’entrée partiel intéressant pour ceux qui souhaitent s’exposer davantage à la zone euro à long terme.