Pendant plusieurs décennies, les investisseurs se sont concentrés sur les classes d’actifs comme principaux éléments constitutifs de leurs portefeuilles. L’analyse des facteurs communs (tels que la valeur et la taille) affectant le risque et le rendement des investissements a donné naissance à l’approche de l’investissement factoriel (voir article précédent). Les principaux investisseurs institutionnels utilisent des modèles factoriels dans leur processus d’investissement, mais cette approche est-elle judicieuse pour un investisseur privé?
Récemment, les investisseurs institutionnels ont de plus en plus considéré les facteurs comme une alternative aux classes d’actifs. Les facteurs détermineraient les décisions d’allocation d’actifs tandis que les classes d’actifs et les titres individuels deviendraient de simples véhicules de mise en œuvre. Dans son application la plus extrême, les facteurs remplaceraient même les classes d’actifs en tant que blocs de construction de portefeuilles.
L’application des facteurs en tant que blocs de portefeuilles nécessite une utilisation extensive des produits dérivés et pose plusieurs défis aux investisseurs individuels : Une stratégie basée exclusivement sur des facteurs aura inévitablement des biais structurels, ce qui est préjudiciable à un portefeuille équilibré à long terme. Même après l’identification des moteurs communs, les investisseurs sont confrontés à plusieurs défis dans la construction de modèles factoriels, car les données réelles ne capturent pas les facteurs de manière directe. L’utilisation de facteurs au lieu de classes d’actifs devient alors plus risquée et plus coûteuse. * Les investisseurs devraient être en mesure de construire leurs portefeuilles sans avoir à payer des coûts de transaction excessifs, sans augmenter le risque de liquidité et en évitant de conclure des transactions de dérivés complexes.
La distinction la plus importante entre les facteurs et les classes d’actifs est que les facteurs ne sont pas stables et ne permettent pas un investissement direct comme les classes d’actifs. Les facteurs introduisent donc à la fois un risque et un coût supplémentaire parce qu’ils doivent être continuellement rééquilibrés sans correspondre à des véhicules d’investissement effectifs.
Les investisseurs sont donc mieux servis en utilisant des classes d’actifs pour représenter les pondérations stratégiques de leur portefeuille, quand bien même la plupart des investisseurs pense à juste titre que les facteurs peuvent améliorer la compréhension et la performance des portefeuilles. Bien qu’ils ne puissent se substituer aux classes d’actifs, les facteurs peuvent jouer un rôle précieux dans la composition des portefeuilles. Les stratégies factorielles resteront donc probablement un élément clé de l’investissement moderne afin de gérer le risque total du portefeuille et de capturer les primes de risque par le biais du processus d’allocation d’actifs.
En résumé, les investisseurs doivent continuer à répartir leurs actifs entre les différentes catégories, mais en tenant compte de leurs préférences en matière d’exposition aux facteurs. Bien qu’il soit recommandé à la plupart des investisseurs de suivre une approche passive et d’utiliser les classes d’actifs comme éléments constitutifs des portefeuilles, les facteurs peuvent offrir des opportunités intéressantes pour améliorer la performance des investisseurs plus avancés.
* Note pour les investisseurs avancés : La proposition d’élargir la fonction de base (maximiser le rendement et minimiser le risque) en ajoutant l’objectif d’écart minimum par rapport aux coûts d’un profil factoriel préféré est une piste pour d’aborder cette question, mais elle ajoute de la complexité sans résoudre le problème des coûts.
Sources Factor Allocation Model: Integrating Factor Models and Strategies into the Asset Allocation Process, The Journal of Portfolio Management, Volume 47, Issue 5, 2021, Dimitris Melas The Role of Factors in Asset Allocation, The Journal of Portfolio Management, Volume 47, Issue 5, 2021, Mark Kritzman Factor Allocation as Reverse Attribution, The Journal of Portfolio Management, Volume 47, Issue 5, 2021, Joseph Simonian Macro Factor Model: Application to Liquid Private Portfolios, The Journal of Portfolio Management, Volume 47, Issue 5, 2021, Scott Gladstone, Ananth Madhavan, Anita Rana, and Andrew Ang